Interview, Michel Szlazak, illustrateur de la Next-Gen

Date 12/10/2009 0:00:00 | Sujet : Interview

Il y a longtemps que sur Le Journal de la Next-Gen nous avons adopté le slogan de nos confrères de Paris-Match : " Le poids des mots, le Choc des photos" et comme " un court croquis vaut mieux qu'un long discours ", nous avons découvert un illustrateur de talent, Michel Szlazak qui nous a reçu sur sa planche à dessin


Yehudi Menuhin disait « Le génie c'est un peu de talent, un peu de chance et beaucoup, beaucoup de travail » nous avons pu en juger avec Michel Szlavak qui entre 2 coups de crayon a bien voulu répondre à quelques unes de nos questions.

Le JDNG vous dit tout, sur tout dans le domaine de l'illustration mais surtout sur Michel Szlavak, un illustrateur comme il aime à se définir

Tous les chemins mènent à Rome, Michel Szlazak en est le parfait exemple, ainsi après des études d'ingénieur en aéronautique, il embrasse la carrière du Design et tout naturellement vient au dessin après mûres réflexions.

Il nous paraissait intéressant de faire un tour dans l'univers de l'illustration avec ce témoignage de  d'autant plus que notre "dessinateur", s'illustre dans le coté Hi-Tech de la Next-Gen.

Vous notre interview :

Le JDNG : Quel est votre parcours ?

J’ai eu un parcours assez biscornu mais j’ai toujours gardé un objectif fixe : dessiner. Dès le lycée, je me suis intéressé aux études artistiques. Sous la pression familiale, j’ai pourtant commencé dans une filière scientifique et j’ai mis du temps avant de franchir le pas. C’est en voulant marier mes aspirations d’ingénieur aéronautique et mon goût du dessin que j’ai découvert le design. Au début des années 90, on commençait tout juste à en parler en France.

J’ai donc débuté comme designer après des études à l’Ecole Nationale Supérieure de Création Industrielle. Mes premiers dessins, je les faisais pour le marketing et les stands dans des agences de com. Ça s’appelle le rough (lire reuff). Puis j’ai passé 3 ans à fabriquer des accessoires spéciaux pour le cinéma.





Via une agence (FM-média, spécialisée dans la communication en milieu scolaire), j’ai fait mes classes dans le dessin d’affiches et de jeux pour enfants. Mais je déviait déjà de plus en plus vers l’infographie.

Comme je suis passionné d’actualité, j’ai fait pas mal de dessins humoristiques chaque fois qu’un sujet m’interpellait. J’ai essayé de démarcher des journaux, mais visiblement je n’étais pas encore fait pour ça.

Le JDNG : Quand et comment avez-vous commencé votre carrière d’illustrateur ?

Vous savez, je pense que le dessin est une affaire de maturité. Il y a des moments dans la vie où l’on est fait pour faire quelque chose et d’autres où il faut attendre d’être prêt. J’ai toujours rêvé de faire de la BD, mais c’est un tel travail qu’avant d’en avoir fini une j’en étais déjà insatisfait. Je me disais que mon truc c’était plutôt le dessin rapide, une image ou deux pour exprimer une idée.

J’aime bien trouver le mot et le geste minimal pour exprimer tout un univers drôle. Surtout si sous l’idée principale s’en cache une autre que chacun peut interpréter à sa façon. Le lecteur s’approprie l’image,. Avec très peu de traits on exprime toutes les idées possibles et imaginables. C’est un peu comme lire un livre et créer son propre décor visuel.

Le vrai démarrage de ma carrière s’est fait lorsque j’ai été contacté par une grande maison d’édition (De La Martinière) pour illustrer de façon comique 60 pages d’un livre pour la jeunesse sur le divorce. Une fois que vous avez publié, toutes les portes s’ouvrent à vous dans l’édition. Avant, on vous claque la porte au nez. J’ai bien senti la différence.

Ensuite les choses se sont enchaînées, j’ai trouvé mon élément, je me sentais vraiment pro là dedans, voire même génial ! et les clients sont arrivés d’eux-mêmes . J’avoue que mes différentes expériences et rencontres m’ont bien aidé pour construire une solide démarche commerciale. A chaque mailing, chaque plaquette ou salon, je peaufinais mon discours et j’adaptais mon offre aux besoins du marché. Rien n’est figé, il faut innover sans cesse pour avancer.




Le JDNG : Rêviez-vous d’être illustrateur quand vous étiez petit ?

Je me rappelle des mes premiers dessins au CP, je copiais mes personnages préférés du magazine PIF : Hercule, Supermatou, …

Je me suis souvent demandé si je serais devenu dessinateur si je n’avais pas eu deux copains qui dessinaient vraiment bien et qui m’ont donné le goût de la BD. Le plus drôle dans tout ça, c’est qu’ils étaient bien meilleurs que moi à leur âge, et que je suis le seul à avoir persévéré dans cette voie. L’un deux est infographiste pour la télé et l’autre est architecte et dessine toujours un peu. De plus dans ma famille, je suis le seul artiste, ou disons, le seul à avoir développé mon talent.

Le JDNG : Quelles sont vos références ?

Oh, elles sont diverses, ça va du dessin humoristique d’article de presse, à l’illustration de livres ou au dessin très technique. Un peu de couverture de magazines aussi. Tout s’illustre ! Je possède en fait deux casquettes, l’une très BD humour et l’autre plus proche de l’infographie et du schéma technique ; les sciences sont un peu mon dada. Certaines années je fais surtout du comique, d’autres je ne fais quasiment que du technique. Je travaille depuis pas mal d’années sur la BD parfaite, et là aussi, les choses évoluent, mûrissent. Mes autres expériences me permettent d’améliorer mon histoire et mon dessin, et j’espère qu’ au moment venu les éditeurs suivront. Sinon, j’ai plein de projets de livres illustrés en cours de finalisation, comme des recueils humoristiques sur des sujets comme l’informatique et Internet, et j’espère en sortir quelques-uns cette année.

Le JDNG : Comment vous viennent vos idées ? / votre inspiration ?

Elles tombent du ciel (rires). Sincèrement, je ne sais pas vraiment. J’écoute les gens, j’observe la société, j’entends une boutade et ça se mixe tout seul dans ma tête pour donner une histoire drôle, une série de petites BD ou un projet à développer. C’est instantané, comme un flash, ça peut tomber pendant une conversation, un questionnement intérieur ou juste avant de dormir. Parfois c’est juste une idée, parfois une série complète qui me vient à l’esprit… On a la sensation unique que quelque chose de génial vous tombe du ciel , sans que ce soit réfléchi ni calculé. Ça vient tout seul, et on se dit « Eurêka » ! Parfois je réfléchis pour une commande, je trouve des idées sympas puis au dernier moment tombe l’idée géniale qui écrase les autres. C’est à la fois mystérieux et excitant. Ma compagne est une bonne source d’inspiration aussi. Elle est drôle et me fait souvent rire. En plus je peux tester mes idées sur elle. Surtout quand elles concernent une clientèle plutôt féminine ! C’est une excellente critique.


Le JDNG : Vous identifiez-vous à vos personnages ?

Complètement, mes personnages sont à 100% des parties de moi-même, tout comme il m’arrive souvent de jouer mes propres personnages, ça va dans les deux sens. Je dessine ce que je suis et je suis ce que je dessine. Je vis complètement entre les deux mondes.

Le JDNG : Avez-vous des dessinateurs fétiches ?

Faute d’avoir une bonne mémoire, je connais très peu de noms de dessinateurs, et puis j’ai mon propre style donc ce qu’ils font ne m’attire pas tant que ça. Je n’aime pas copier même si je l’ai beaucoup fait quand je cherchais mon trait. Mais j’ai des idoles et l’un d’eux est Plantu pour la souplesse et la simplicité de son trait, son regard aussi, j’aime dire que je serai Plantu de demain, si, si j’y crois vraiment (rires). Sinon, j’aime beaucoup le trait de Franquin, il est parfait mais ce n’est pas pour autant que j’essayerai de le copier. Le plus important, c’est de trouver son style et pour çela il faut passer par l’étape copie. C’est quand on a réussi à s’abstraire de modèles que l’on peut dire « j’y suis arrivé », même si l’on continue son évolution.

Le JDNG : Rencontrez-vous parfois des difficultés face à une demande ?

Tout le temps. J’ai beaucoup de clients dans la presse spécialisée et sortir en 24h une histoire drôle sur le thème des finances en biotechnologies ou du dernier salon d’ophtalmologie… C’est presque mission impossible à chaque fois. Mais avec l’habitude je ne désespère plus à la lecture des articles qu’on me soumet. Je ne sais pas par quel miracle je trouve toujours quelque chose, l’effet « illumination » sans doute ! J’avoue que je m’étonne moi-même sur certains coups. Peut-on rire de tout ? Je crois que d’une certaine façon, oui.




Avez-vous des sujets tabous ?


Non, j’ai juste un style. J’essaye d’être convenable, ne pas heurter ni insulter les gens. Je n’aime pas la vulgarité. Mes dessins sont toujours soft et tout en finesse. C’est peut-être pour ça que je rencontre un bon succès auprès de mes clients. Ce sont souvent des professionnels et des directeurs de rédaction, des personnes adultes, donc je me dois d’être correct.

Le JDNG : A quand la BD ?

Bientôt j’espère. Je travaille actuellement sur un scénario, l’univers est plutôt bien élaboré et les personnages fixés. Les décors sont en cours et j’espère terminer les premières planches avant la fin de l’année. Mais c’est long, très long, surtout en sachant que pour percer dans cet univers il faut vraiment être le meilleur. Je ne parle pas de la BD à la mode qui raconte des petites histoires sur monsieur ou madame tout le monde, mais bien de la BD d’art, celle qui est proche du roman avec de très belles images et de jolis cadrages. Ce sera une histoire de nounours où je m’inspire de contes pour enfants comme les Mummin, de romans fantastiques et surtout de mes deux anciens chiens, d’adorables Shi-Tzu. Et dans la tradition de cette lecture à plusieurs niveaux que j’apprécie tant, ce sera à la fois une histoire sombre et un conte, donc pour les petits et les grands. C’est mon côté commercial qui ressort un peu là !

Le JDNG : C’est sympa comme métier au quotidien ?

C’est un métier… il a le mérite de me correspondre et j’ai l’impression d’être quelqu’un et surtout d’être reconnu pour ce que je fais. Je ne suis pas un coût salarial, ni un travailleur anonyme remplaçable dans une entreprise. C’est une sensation géniale qui vous donne l’impression d’exister. D’autant plus quand vous savez que votre nom et votre travail se trouve à jamais classé à la Bibliothèque Nationale. Peut-être perdu et condamné à la poussière, mais c’est un peu une part d’éternité. Un jour peut-être un chercheur se demandera : « mais qui était ce type ? », C’est une sensation bizarre. On peut publier pas mal de bêtises mais quand on est associé à un projet important, vous pouvez mourir en sachant que vous avez existé et que c’est gravé dans la pierre.

Le JDNG : N'êtes-vous pas blasé par le dessin parfois ?

Si, des fois j'en ai vraiment pas envie, mais il le faut, alors je chante « Qu'on me donne l'envie, l'envie d'avoir envie… » (rires), mais jamais je n’ai douté de ma vocation. Je sais que c'est juste une fatigue passagère et que les crocs du créateur reviendront le moment venu.

Le JDNG : Comment démarchez-vous vos clients ?

C'est un énorme travail, presque spirituel. Une profession de foi, la conviction d'être potentiellement le meilleur et qu'à force d'essayer on va y arriver. Parfois, devant le manque de résultats, on a toutes les raisons d'abandonner mais on ferme les yeux et on fonce encore. Mais c'est vraiment un énorme travail sur soi, une maturité qu'on acquiert après avoir pas mal vadrouillé. Ensuite on ne tombe pas toujours dans le domaine qu'on a visé. Ce qui est génial c'est que les demandes en retour sont tellement variées qu'elles me poussent à enrichir mon vocabulaire graphique et à diversifier mon offre.

Le JDNG : Avoir un talent suffit-il pour faire carrière dans le dessin ?

Je dirais que non. Le grand violoniste Yehudi Menuhin disait « Le génie c'est un peu de talent, un peu de chance et beaucoup, beaucoup de travail » et je suis d'accord avec lui. Le trait, le style, la créativité, ce sont des heures et des heures d'errements et d'évolution. Il m'a fallu près de 10 ans pour arriver à ce que je suis et je trouve que j'ai encore bien des choses à faire évoluer. Mais j’évolue avec les demandes aussi. Aujourd'hui je travaille mon trait pour l'adapter au dessin de presse, demain ce sera peut-être pour un autre support. En BD, on dessine autrement. Parfois il faut combler des lacunes sur des demandes spécifiques. Bref, c'est beaucoup de dessins et un entraînement quasi quotidien…

Le JDNG : Merci Michel


Vous voulez en savoir plus sur Michel Szlavak :

Michel Szlazak – illustrateur

michalweb.free.fr / 06 29 53 31 37





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