Grâce au RGPD, des structures compétentes sur la question des données personnelles peuvent saisir les tribunaux en cas de violation de ces dernières. L'ONG Internet Society France, à travers son initiative E-Bastille, s'est saisie de ce nouveau droit et a mis en demeure Facebook il y a 4 mois.
Une période qui aurait pu servir au réseau social pour se mettre en conformité. 4 mois plus tard, Facebook ne prend pas au sérieux les requêtes des internautes et ouvre ainsi la voie à une poursuite judiciaire de l'action. 7 manquements aux droits numériques des citoyens portés à la connaissance de Facebook L'Initiative E-Bastille de l'Internet Society France recueille depuis mai 2018 des doléances d'internautes. Le 8 novembre dernier, l'ONG a engagé la première action de groupe indemnitaire fondée sur une violation alléguée de la réglementation européenne en matière de données personnelles. Articulée autour de 7 griefs (détails ci-dessous), elle est dirigée contre Facebook France, Facebook Inc., la maison mère, et Facebook Ireland. Comme la Loi le prévoit, l'association qui porte cette action doit au préalable adresser aux contrevenants un courrier de mise en demeure suivi d'un délai de 4 mois qui laisse la possibilité d'une explication ou d'une mise en conformité, avant de pouvoir saisir la justice. Cette lettre de mise en demeure a été adressée par l'Internet Society France en un seul courrier adressé aux trois sociétés Facebook le 8 novembre 2018. Des réponses méprisantes ? Par trois courriers distincts tous datés du 11 mars 2019, soit au terme du délai de 4 mois, chacune des sociétés a répondu à l'Internet Society France : • La société Facebook France fait valoir qu'elle « n'a aucun contrôle sur les données des utilisateurs du service », qu'elle « n'opère ni n'héberge le service Facebook », qu'elle a pour activité « le support publicitaire ainsi que cela ressort de son extrait k-bis » (sic) auquel elle se limite, et qu'ainsi elle est étrangère à l'interpellation. • La société Facebook Inc., en un courrier en langue anglaise, se considère également non concernée par les questions essentielles qui lui sont posées, reproduisant sa stratégie habituelle qui l'avait poussée à refuser de comparaître devant la CNIL en 2017 (Délibération CNIL SAN-2017-006), lorsqu'elle y avait été condamnée à la sanction maximale solidairement avec Facebook Ireland. • La société Facebook Ireland précise que seule l'autorité de contrôle irlandaise, la Data Protection Commission (DPC), équivalent de la CNIL en Irlande, est susceptible de répondre à toutes les questions concernant le service Facebook puisqu'elle a désigné cette autorité de contrôle comme son autorité de contrôle administrative chef de file. La société irlandaise répond ensuite sur 9 pages aux 7 griefs énoncés par l'Internet Society France, tentant de justifier la légalité des pratiques qui lui sont reprochées, tout en reconnaissant leur réalité et désigne enfin, un avocat français basé à Paris pour la représenter en cas de « questions ou commentaires ». Facebook estime que ses propres utilisateurs n'ont pas le droit élémentaire à une action judiciaire dans leur pays Les premiers écrits des sociétés du groupe Facebook posent un problème de fond. Il est une règle universelle appliquée dans le monde entier que chaque consommateur a un droit d'accès à sa justice pour, dans le cadre d'un débat, qu'elle tranche des litiges avec les sociétés qui lui offrent des services. Toute règle contraire a pour effet, sinon pour objet, de priver tout citoyen de son Etat de droit. Par son refus de s'expliquer s'agissant des sociétés Facebook France et Inc., par son renvoi en Irlande pour la Société Facebook Irlande, le Groupe Facebook signifie aux utilisateurs français et d'Europe continentale qu'elle leur dénie un droit humain élémentaire. Nicolas Chagny, président de l'Internet Society France, commente : « Cette attitude scandaleuse de négation du droit à la justice sur le sol français constitue en soi un huitième grief et nous entendons bien le soumettre aux juridictions compétentes. » Vers une action en justice Facebook Ireland ayant invitée dans son courrier, à la rencontrer pour évoquer le litige, l'Internet Society France y répondra favorablement avant la poursuite de son action judiciaire ; elle entend plus que jamais engager cette action avec le soutien des près de 1 000 personnes qui lui ont donné un pouvoir d'agir, avant que de nombreux autres la rejoignent. Un manifeste intitulé « Déclaration citoyenne pour la protection de nos données personnelles », signé par des personnalités du Web, est publié ce jour par E-Bastille, pour rappeler à quel point les droits numériques des internautes sont des droits humains à part entière. Il alerte sur les dommages qui peuvent être causés par le non-respect des données personnelles et appelle à une prise de conscience sociétale sur ces enjeux démocratiques majeurs. |