A l'approche de la sortie d'iPad sur le marché français et des prochaines tablettes concurrentes, voici une parole d'expert de JOUVE, prestataire de services pour la conversion, la création et la diffusion de contenus numériques. Emmanuel Benoît, Directeur Marketing stratégique de Jouve,nous informe sur les enjeux de ce marché pour les éditeurs et les utilisateurs.
Le livre numérique : de l’indifférence à l’effervescence médiatique
Le livre numérique (ebook) fut longtemps considéré comme un support de diffusion anecdotique par les auteurs et les maisons d’édition. Si plusieurs sociétés ont tenté d’imposer leurs formats et leurs lecteurs (Palm, Microsoft, ereader, Sony, Amazon…), les chiffres de vente sont longtemps restés insignifiants. Dans ce contexte, la conversion des titres des éditeurs était financée par ces différents acteurs qui exigeaient en contre partie de conserver la propriété sur les fichiers numériques convertis.
L’arrivée du Kindle 2 en 2009 aux Etats-Unis et l’émergence d’un format ouvert promu par Sony et Adobe (epub) ont changé la donne et ces derniers ont compris que sans un catalogue de contenus de taille significative, ils ne susciteraient pas l’intérêt du public. La course aux titres était lancée. Des dizaines de milliers d’ouvrages (principalement de littérature générale) ont été convertis aux frais des éditeurs ou des distributeurs. Amazon a développé un modèle de distribution intégré (terminal de lecture, site de vente en ligne des ouvrages numériques, prestation d’impression à la demande…) en fixant un prix de vente unique du livre à 9,99$ et Sony s’est longtemps affiché comme son principal et unique concurrent. Le développement de ce marché s’est pourtant accéléré avec l’arrivée de Barnes & Noble avec le Nook (disponible en ligne et dans ses magasins), de Hearst sur le marché du journal avec son lecteur A4 le Skiff et de nombreux autres fabricants.
Google s’intéresse aux livres…
Dans le même temps, Google lançait son programme Book Search et finançait la numérisation de millions d’ouvrages. Ses objectifs principaux : indexer les textes numérisés via son moteur de recherche, garantir la visibilité de nombreux contenus auprès des internautes et vendre des annonces publicitaires additionnelles. Loin des objectifs de préservation du patrimoine culturel, véritable enjeu pour les grandes bibliothèques et les Etats, le projet de Google n’est pas non plus comparable aux initiatives des acteurs de la chaîne du livre.

Les processus de numérisation mis en place ne produisent pas des contenus numériques susceptibles d’être commercialisés (problèmes de qualité et de finesse de traitement notamment), sans parler des problèmes de droits d’auteur qui ont nourri l’actualité juridique de ces derniers mois. Ces volumes ont cependant permis d’alimenter les bases de contenus d’un certain nombre de distributeurs.
En 2009, les premiers succès commerciaux, les taux de croissance des ventes à deux chiffres et l’arrivée annoncée de l’iPad ont accéléré la prise de conscience des acteurs de la chaîne du livre concernant les enjeux et les opportunités du numérique : risques et pérennité des modèles économiques, contrôle du prix de vente, partage des royalties, contrôle de la relation client, piratage des ouvrages numériques…
La lecture passe du mode texte au mode 2.0
Les professionnels du livre ne sont pas les seuls à sembler perplexes devant ces enjeux. Si nous sommes confrontés à une offre foisonnante de terminaux (tablette, netPC, liseuse, téléphone portable…), ce marché des lecteurs est peu lisible pour les consommateurs et les contenus numériques proposés sont somme toute assez pauvres. Un peu comme à l’origine du web, simple vitrine de communication avant sa mutation vers le web 2.0, les acteurs du livre ont cherché à dupliquer ce qu’ils connaissaient en créant des produits numériques dérivés des contenus existants sans remise en question des modèles connus (volonté de reproduire le support imprimé).
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