La transhumance est une pratique agricole ancestrale consistant en le déplacement saisonnier du bétail entre différentes zones de pâturage. Ce système vise à optimiser l’utilisation des ressources naturelles disponibles selon les périodes de l’année. Présente dans de nombreuses régions du monde, cette méthode revêt une importance écologique, économique, culturelle et sociale considérable. Dans cet article rédigé par EcologieVerde, nous vous expliquerons en détail en quoi consiste la transhumance et quels en sont ses bienfaits.
Qu’est-ce que la transhumance et son lien avec l’écologie
La transhumance désigne une pratique pastorale traditionnelle qui consiste en le déplacement saisonnier du bétail entre différentes zones de pâturage. L’objectif est d’utiliser de manière durable les ressources naturelles, en faisant migrer les troupeaux vers des pâturages en altitude ou en montagnes durant l’été, puis vers des plaines ou régions plus chaudes en hiver. Cette pratique, pratiquée depuis des siècles, s’adapte à chaque contexte climatique et géographique spécifique.
Sur le plan écologique, la transhumance joue un rôle primordial dans la préservation des écosystèmes. En répartissant le bétail de façon équilibrée entre plusieurs zones, elle permet d’éviter le surpâturage, qui peut provoquer la dégradation des sols et nuire à la biodiversité. Par ailleurs, le déplacement constant des troupeaux contribue à la dispersion des graines, stimulant la régénération végétale et la diversité biologique. Ce processus participe également à maintenir les paysages ouverts, empêchant la prolifération de broussailles pouvant augmenter le risque d’incendies de forêt.
Les différents types de transhumance
La transhumance peut être classée en plusieurs catégories selon la région, les conditions climatiques ou encore les itinéraires empruntés :
- Transhumance verticale : ce type, le plus répandu, consiste en le déplacement du bétail entre des zones de différentes altitudes. En été, les éleveurs emmènent leurs troupeaux en montagne, où il fait plus frais et la végétation est plus abondante. En hiver, ils redescendent dans des vallées ou plaines plus douces, où le climat est plus clément et la nourriture toujours disponible. On retrouve ce mode dans des régions comme les Alpes françaises, les Pyrénées ou les massifs du Massif Central.
- Transhumance horizontale : ici, le troupeau se déplace entre régions situées au même niveau d’altitude, mais présentant des conditions climatiques ou écologiques différentes. Par exemple, on peut déplacer les animaux vers des zones plus humides en saison sèche, puis vers des zones plus arides lors des périodes pluvieuses. Cette forme est typique des vastes plaines ou zones étendues comme la Provence ou la Camargue.
- Transhumance côtière : cette modalité a lieu dans les zones littorales, où les bêtes circulent entre des régions proches de la mer et des terres intérieures. En général, les espaces côtiers sont réservés en hiver en raison du climat plus doux, tandis que les terres intérieures sont exploitées pendant l’été. La région méditerranéenne en est un exemple évident.
- Transhumance transfrontalière : dans certains cas, les itinéraires de déplacement traversent plusieurs frontières nationales, notamment dans les régions où les conditions écologiques ne respectent pas de frontières politiques. On retrouve cette pratique chez les troupeaux nomades du massif du Sahel, ou encore chez les éleveurs espagnols et portugais.
Les avantages de la transhumance
La pratique de la transhumance offre de nombreux bénéfices, notamment sur les plans écologique, économique, culturel et social :
Avantages écologiques
- Protection de la biodiversité : en déplaçant le bétail d’une zone à une autre, on limite le surpâturage, favorisant la régénération des milieux naturels.
- Préservation contre les incendies : un pâturage régulé permet de gérer la végétation, réduisant la quantité de matière sèche susceptible d’alimenter un futur incendie.
- Amélioration des sols : l’activité du bétail et ses déjections contribuent à enrichir le sol en éléments nutritifs, favorisant la fertilité et limitant l’érosion.
- Réduction des émissions de gaz à effet de serre : en privilégiant un mode de gestion durable, la transhumance émet généralement moins de gaz nocifs comparé à une élevage intensif.
Avantages économiques
- Utilisation optimale des ressources : les éleveurs peuvent exploiter des pâturages qui, autrement, resteraient inutilisés pendant certaines saisons.
- Produits de qualité : la viande, le lait et autres dérivés issus du bétail transhumant sont souvent de haute qualité, élaborés dans le respect des méthodes durables, ce qui leur confère une valeur ajoutée sur le marché.
- Réduction des coûts : en évitant l’achat régulier de fourrages ou d’aliments transformés, les éleveurs réduisent leurs dépenses, renforçant ainsi leur autonomie financière.
Avantages culturels
- Transmission des traditions : la transhumance façonne un héritage culturel riche, transmis de génération en génération.
- Sentiment d’identité : cette pratique forge un lien profond entre les communautés pastorales et leur territoire, renforçant leur cohésion.
Avantages sociaux
- Création d’emplois rurales : la transhumance contribue au dynamisme économique des zones rurales, limitant leur dépeuplement.
- Éducation à l’environnement : elle sensibilise à l’importance d’une gestion respectueuse des milieux naturels et à la nécessité d’un mode de vie durable.
Itinéraires de transhumance en France
En France, la transhumance possède une longue tradition remontant au Moyen Âge, lorsque l’élevage ovin représentait une activité économique majeure. Cette pratique a modelé un réseau historique de chemins appelés chemins de transhumance, qui traversent le territoire national.
Les chemins de transhumance sont les voies principales par lesquelles les éleveurs déplaçaient leurs troupeaux entre les pâturages d’été et d’hiver. Ces itinéraires, protégés par la loi pour préserver leur usage traditionnel, ont une largeur réglementaire d’environ 21 mètres (75 varas). Parmi les plus connus, on peut citer :
- Le chemin de la Montagne Noire : reliant le Massif central aux Pyrénées, il mesure plusieurs centaines de kilomètres et relie les zones de pâturage des Cévennes aux régions pyrénéennes.
- Le chemin du Languedoc : reliant la vallée de la Cèze à la Camargue, il traverse plusieurs départements dans le sud de la France.
- Le chemin de Provence : une voie historique qui relie le Vaucluse à la Haute-Provence, facilitant le mouvement des troupeaux durant la saison estivale.
- Les itinéraires de la Drôme et de l’Ardèche : reliés à d’autres routes historiques, ils formaient un réseau cohérent permettant la circulation du bétail à travers le sud-est.
La transhumance à travers le monde
La transhumance ne se limite pas à l’Espagne ou à la France, puisqu’elle est pratiquée dans de nombreuses régions du globe, adaptées aux contextes géographiques, climatiques et culturels locaux. Voici quelques exemples de pays où cette pratique demeure vivante :
- Alpes (Suisse, France, Italie, Autriche) : dans cette région, la transhumance se déroule principalement entre les vallées et les montagnes, étant étroitement liée à la production de fromages tels que le Gruyère ou le Parmesan.
- Balkans (Grèce, Albanie, Macédoine du Nord) : les bergers déplacent leurs troupeaux entre zones montagneuses et plaines côtières.
- Écosse (Hautes Terres) : le mouvement du bétail entre les hautes terres et les régions basses est une pratique ancestrale, adaptée aux climats froids.
- Himalaya (Inde, Népal, Bhoutan, Pakistan) : des communautés pastorales, comme les Gujjars ou les Bakarwals, pratiquent la transhumance dans ces massifs montagneux.
- Asie centrale (Mongolie, Kazakhstan, Kirghizistan) : la vie nomade y maintient ces migrations saisonnières, essentielles à leur mode de vie.
- Tibet : les éleveurs tibétains déplacent leurs yaks et chèvres pour exploiter au mieux les pâturages des hauts plateaux tibétains.
- Sahel (Mauritanie, Mali, Niger, Tchad) : cette région semi-aride voit ses pasteurs déplacer leur cheptel entre zones arides et plus humides lors de la saison des pluies.
- Afrique de l’Est (Kenya, Éthiopie, Tanzanie) : certaines tribus, comme les Maasai, pratiquent la transhumance pour avoir accès à l’eau et aux pâturages dans les savanes et les zones montagneuses.
- Andes (Pérou, Bolivie, Chili, Argentine) : dans cette chaîne montagneuse, la transhumance est principalement associée à l’élevage de lamas, d’alpagas et de moutons.
Il ne reste plus qu’à se renseigner sur cette pratique pour mieux comprendre son importance et ses enjeux, en espérant qu’elle puisse continuer à prospérer tout en respectant l’environnement et les traditions locales.
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- Plateforme pour l’Élevage Extensif et le Pastoral : 2015. La transhumance, patrimoine culturel immatériel. Disponible sur : https://www.ganaderiaextensiva.org/la-trashumancia-patrimonio-cultural-inmaterial/
- Musée Virtuel de l’Écologie Humaine : 2024. La transhumance comme patrimoine culturel de l’humanité. Disponible sur : https://museoecologiahumana.org/piezas/la-trashumancia-como-patrimonio-cultural-de-la-humanidad/
- Terranostrum : Les chemins de la transhumance. Disponible sur : https://www.terranostrum.es/senderismo/los-caminos-de-la-trashumancia
- José Tudela de la Orden : La transhumance : son origine, son évolution, ses types. Disponible sur : http://soria-goig.com/Etnologia/trashumancia1.htm