L’autonomie de l’enfant est un chemin fait de moments de prise de conscience, où le soutien des parents et des personnes proches occupe un rôle primordial pour l’acquisition de nouvelles compétences.
L’enfant qui s’habille seul ou mange sans se salir est, aux yeux du monde entier, un « bon enfant ». L’enfant qui demande des explications et dit « je n’aime pas les asperges », qui ne veut pas peindre mais construire une tour, est, en revanche, « un chenapan ». Mais pour que les enfants grandissent avec un sens critique, conscients de leur pensée, sûrs de leurs goûts, de leurs capacités et de leurs valeurs, ainsi que de leurs défauts et de leurs limites, il est nécessaire qu’ils soient éduqués dans ce sens. Avoir sa propre opinion ou ne pas être d’accord avec le point de vue des parents n’est pas faux, mais un signe d’une bonne maturité de la personne, qui devrait remplir d’orgueil maman et papa (ainsi que l’école et les enseignants).
Apprendre à gérer ses propres idées
Ce qui peut être faux, et qui doit donc être orienté et guidé, est la manière de faire valoir ses idées, c’est-à-dire apprendre à « protester bien »:
- Je ne peux pas frapper ou crier contre maman et papa pour faire entendre ma voix
- Je ne peux pas, par ma volonté, limiter l’action des autres
- Je ne peux pas lancer des objets et je ne dois pas me mettre en danger ni me faire mal
Le parent a la responsabilité éducative de tracer cette frontière, le champ d’action de l’enfant qui doit s’élargir progressivement à mesure que grandissent ses compétences et son autocontrole.
Un enfant « écouté », accueilli dans son unicité et donc aussi dans la discordance et dans le confrontation entre sa volonté et celle des parents, apprendra plus facilement à s’exprimer avec calme et naturel, car il sera certain que sa parole sera écoutée. Et même si son opinion ne modifiera pas l’état des choses, il apprendra un autre aspect fondamental de la communication entre les personnes : l’objectif n’est pas d’avoir raison à tout prix, mais d’écouter et d’être écouté.
Un âge juste pour chaque compétence
Confier la gestion d’un dressing quatre saisons à un enfant de 3 ans est un pari risqué : pour lui, il pourrait vouloir aller à l’école en maillot de bain en plein janvier, et cela, bien sûr, n’est pas possible. Le petit, toutefois, pourrait ne pas avoir la compétence ou la force pour comprendre et accepter cette limitation. C’est pourquoi il est important d’éviter de le placer dans une situation que nous savons qu’il ne pourra pas gérer en autonomie.
Un enfant de 3 ans peut choisir quels vêtements mettre mais la sélection parmi laquelle choisir revient à l’adulte. Le parent peut, par exemple, aménager un petit placard capable de contenir trois pulls, quatre t-shirts, quatre pantalons, quelques sous-vêtements, débardeurs et chaussettes, et éventuellement collants, robes et jupes.
Des projets pour conquérir le monde
Un enfant commence à faire des choix alors qu’il n’est pas encore conscient de savoir le faire : au début de la vie, il sait quand il a faim, sommeil, envie d’un câlin, de rester à plat sur le sol, d’être changé. Et il le communique.
Ces instincts se transforment bientôt en véritables actes de volonté : lorsque ses mains, vers 4-5 mois de vie, commencent à agir sur le monde, il découvre l’immense pouvoir qu’il détient. L’enfant grandit et ses projets grandissent tout comme ses stratégies pour conquérir le monde qui l’entoure. Il affine les techniques, apprend à gérer les imprévus et réadapte les plans lorsque cela est nécessaire. Sa capacité à se connaître et à se diriger vers la conquête du monde dépend énormément de ce qu’il a pu s’entraîner à faire, du nombre d’obstacles qui se dressent entre lui et cette compétence.
Les enfants naissent dotés d’autocontrôle, de curiosité, de confiance en leurs capacités, de ténacité, de patience et de constance. Ce que les adultes devraient faire est de maintenir cette qualité. Comment ? Essayons de résumer quelques conseils.
Réduire les interventions
L’intervention de l’adulte dans la vie de l’enfant doit diminuer parallèlement à la conquête de compétences par le petit. La mère liera les chaussures de son enfant tant qu’il n’aura pas envie de le faire lui-même, puis elle le fera avec lui jusqu’à ce qu’il sache le faire seul, puis elle ne le fera plus; ou elle choisira ce qu’il faut lui donner à manger jusqu’à ce qu’il ait construit un bon vocabulaire alimentaire parmi lequel il puisse choisir de manière autonome.
Suggérer de choisir quand il est en mesure
La liberté de choix ne doit pas être un impératif, mais un droit. Lorsqu’un enfant est fatigué, pleure, a très faim, se sent seul, s’est blessé ou est très en colère, il a simplement besoin que ses besoins primaires soient satisfaits. Demander avec insistance à un enfant en larmes : « Tu veux un câlin ? On sort ? Tu veux un peu d’eau ? Pourquoi pleures-tu ? Que veux-tu ? » n’est pas facilitant, mais frustrant, car l’enfant n’est pas dans les conditions de choisir et même de répondre. Dans ces cas, il a besoin d’un guide fort et rassurant, capable d’être affirmatif : « Viens, je te serre un peu dans mes bras ».
Les choix ont des conséquences
Les choix impliquent des responsabilités, même pour les enfants. Après un choix, on ne peut pas toujours revenir en arrière. Avec les jeunes enfants, la possibilité de « revenir en arrière » après une décision devrait être exclue, afin de consolider le fonctionnement choix‑consequence.
Le parent avertira l’enfant de l’importance de réfléchir bien et d’évaluer calmement avant de choisir. Une fois le choix fait, le parent l’aidera à en accepter les conséquences. Lorsque le parent est conscient que l’enfant ne peut pas prévoir les conséquences de ses décisions, il doit les communiquer clairement : « Si tu choisis de sortir, nous laverons la poupée plus tard, d’accord ? Tu veux sortir ou rester à la maison à laver la poupée ? ».
Lorsque l’on demande à un enfant de faire quelque chose et qu’il ne veut pas, on lui montre quelle est la conséquence de ce choix : « Sans chaussettes, on ne peut pas sortir sur le balcon; si tu les mets, tu sors, sinon tu restes à la maison. Décide toi ». À ce moment-là, il appartient à l’enfant de choisir s’il continue de refuser de mettre les chaussettes, et donc de sortir, ou s’il accepte la règle nécessaire pour accéder au balcon. Le parent, par conséquent, ne devra pas exiger les chaussettes à l’intérieur et n’autorisera pas de sortir sans elles.
Ne pas demander de décider si l’on n’accepte pas la réponse
« Et allons-nous au lit ? » « Non ! » « J’ai dit : on va au lit ! »
Si le parent pose une question, il devrait accepter toutes les éventuelles réponses. Si la réponse souhaitée est unique, il ne faut pas poser une question, mais faire une affirmation : « Il est l’heure d’aller au lit ».
Ceci est très rassurant pour l’enfant. Se sentir proposer un choix puis ne pas voir sa réponse accueillie est, en revanche, profondément frustrant et est perçu comme une injustice.