Fermeture des glaciers, effets secondaires : l’eau de fonte s’infiltre en profondeur et exerce une pression sur les failles, déclenchant des tremblements de terre.
L’eau et les séismes
Depuis longtemps, il est connu que la percolation, c’est-à-dire le passage lent de l’eau à travers les pores de la roche sous l’effet de la gravité, peut jouer un rôle dans le déclenchement des tremblements de terre. La pression exercée par le liquide peut perturber l’équilibre des forces sur les failles, entraînant leur glissement. De petits séismes peuvent ainsi être provoqués par les variations saisonnières des précipitations (comme les monsoons), par des opérations de géothermie profonde qui injectent de l’eau dans le sous-sol, ou encore par la fracturation hydraulique (fracking), processus qui consiste à injecter des fluides pour fracturer la roche et extraire des combustibles fossiles du sous-sol.
De plus, le réchauffement climatique mobilise d’importantes quantités d’eau via la fonte des glaciers. En Alpes françaises, ceux-ci ont perdu près de 30 % de leur surface au cours des trente dernières années, mais jusqu’à présent, aucun lien n’avait été établi entre cette fonte et l’apparition de séismes. Cependant, la récente étude suggère que cette transition vers l’eau liquide pourrait également jouer un rôle dans la survenue de tremblements de terre.
La fonte des glaciers et la montée des séismes
Une équipe de sismologues menée par Toni Kraft et Verena Simon, de l’École polytechnique fédérale de Zurich (ETH), a observé dans la région du Mont Blanc que les petits tremblements enregistrés par les sismomètres tendent à augmenter durant l’été, période de maximum de dégel, puis diminuent à nouveau avec l’arrivée du printemps. Lorsqu’ils ont analysé les données concernant des milliers de séismes mineurs captés par un sismomètre installé en 2006 à une dizaine de kilomètres au sud des Grandes Jorasses, un groupe de sommets dans la partie nord du massif, ils se sont rendu compte que la fréquence et la magnitude de ces tremblements avaient augmenté à partir de 2015, suite à une vague de chaleur exceptionnelle.
En étudiant les données météorologiques de la région, les chercheurs ont constaté que les épisodes de chaleur extrême semblaient accroître de façon significative le risque sismique. Étant donné que l’infiltration de l’eau dans la roche demande du temps, ils ont observé un décalage temporel entre ces épisodes de chaleur et la survenue des séismes : un délai d’un an pour les tremblements superficiels et jusqu’à deux ans pour ceux situés à une profondeur maximale de 7 km.
Un phénomène peut-être valable à l’échelle mondiale
Ce phénomène pourrait être *à l’origine d’un impact à l’échelle mondiale*, particulièrement dans des régions où la présence de glaciers reste encore très importante, comme dans l’Himalaya. La mise en évidence de ce lien pourrait amener à repenser l’évaluation des risques sismiques pour les zones de montagne, en intégrant l’impact potentiel du changement climatique et de la fonte des glaciers.
Il sera également essentiel de tenir compte de ces nouvelles données dans la gestion du risque sismique, afin d’adapter au mieux la sécurité des populations vivant en zones montagneuses, dont la stabilité pourrait être affectée par l’augmentation des flux d’eau infiltrée dans le sous-sol.