Qu’est-ce que la préadolescence et quelles en sont les caractéristiques
La préadolescence est une étape de croissance essentielle, souvent perçue comme une période de transition entre l’enfance et l’adolescence, généralement située entre 9 et 12 ans. C’est durant cette période que les enfants entament une phase de transformations physiques, émotionnelles, cognitives et sociales très marquées. Les parents le savent bien, souvent même avant de l’avoir vécu personnellement : chaque étape de la vie semble avoir ses grands mots à la mode ou ses expressions favorites, comme lorsqu’on entend fréquemment l’adage : « Petit enfant, petits problèmes ; grand enfant, grands problèmes ». Ou encore le célèbre : « Si c’est difficile maintenant, attends de voir à l’adolescence ». Mais cette étape est-elle réellement insurmontable ? La préadolescence est-elle une étape si redoutable qu’on ne pourrait y faire face sans en sortir bouleversé ou blessé ? Ou existe-t-il des moyens de la traverser dans la sérénité ?
Il est essentiel de rappeler que chaque parcours est unique, qu’il s’agisse du contexte familial, social ou personnel. Nous n’avons pas la recette magique, mais, en tant qu’adultes, nous pouvons offrir quelques pistes pour mieux appréhender cette période, souvent tumultueuse, mais aussi riche en découvertes. La clé réside dans la compréhension, la patience et la communication.
Ce qui caractérise cette étape, c’est effectivement un changement profond. Parfois rapide, parfois soudain, il affecte plusieurs sphères de la vie de l’enfant — on pourrait parler, à l’image de certains spécialistes, d’une « âge du tsunami » — et il peut laisser parents et enfants désorientés et déconcertés. La difficulté réside dans la gestion de ces brusques bouleversements.
Cela dit, il ne faut pas céder à la peur ou au fatalisme. La notion de crise, souvent associée au changement, ne doit pas forcément faire peur. Elle peut aussi être considérée comme une opportunité de choix, une chance de rebondir ou de transformer la difficulté en occasion de croissance. Cette dualité est illustrée dans l’idéogramme chinois du mot « crise » : il est composé de deux signes évoquant à la fois le danger et l’opportunité. La période de la préadolescence nous invite donc à laisser derrière nous l’image du jeune fragile, dépendant, qui voit ses parents comme des figures d’ombre ou d’idéal infini, pour accueillir celle d’un futur adulte en devenir, plus autonome, capable d’affronter ses émotions et de forger sa propre identité.
Ce processus de transformation offre aussi une occasion unique de renforcer le lien avec son enfant, en lui permettant de développer sa propre personnalité, tout en conservant le dialogue comme un précieux fil conducteur. Il s’agit d’accepter que, pour accompagner cette croissance, il faut aussi évoluer en tant que parent : apprendre à lâcher prise, à donner confiance, à accepter la remise en question, mais aussi à poser des limites claires et cohérentes.
En définitive, la préadolescence n’est pas seulement un terrain d’épreuves. C’est aussi un moment privilégié pour voir émerger des jeunes en pleine construction, prêts à explorer l’univers qui leur appartient — parfois avec des tempêtes émotionnelles, mais aussi avec de belles promesses de réussite et de maturité.
Quand commence la préadolescence ?
Mais alors, à quel moment précis débute cette fameuse préadolescence ? La réponse n’est pas toute simple, car tout dépend des rythmes de chacun, mais une chose est sûre : ce processus de changements hormonaux et de transformation commence généralement vers 9 ou 10 ans chez les filles, et vers 11 ou 12 ans chez les garçons. Toutefois, il faut garder à l’esprit que ces âges sont indicatifs, et qu’il existe une fourchette plus large allant de 8 à 13 ans pour les filles, et de 9 à 14 ans pour les garçons. Certains enfants, pour diverses raisons, peuvent entrer précocement dans cette phase avec une puberté anticipée.
Il faut aussi différencier la puberté, qui correspond à l’arrivée des changements hormonaux, des signes extérieurs de cette étape transitoire. Chez les fillettes, les premiers signes concernent le développement mammaire, l’apparition de poils pubiens, ainsi qu’une légère croissance des hanches. Chez les garçons, la voix muet, le début de la pilosité faciale, l’augmentation de la masse musculaire et le développement des organes génitaux constituent les premières manifestations visibles.
Ce qui est essentiel, c’est de comprendre que ces modifications physiques sont accompagnées par des bouleversements émotionnels : peur du regard des autres, variations d’humeur, besoin d’indépendance croissant, tout cela forme un cocktail explosif. Hormis l’aspect physique, c’est aussi une période où se construisent l’identité et les opinions personnelles, souvent sous l’influence de la famille, des amis ou de l’environnement.
Les hormones jouent un rôle majeur dans cette mutation : chez les garçons, la testostérone agit sur l’agressivité et l’affirmation de soi, ce qui explique la hausse de comportements impulsifs ou de crises de colère. Chez les filles, l’augmentation des œstrogènes peut favoriser des sentiments plus introvertis ou mélancoliques, ainsi qu’un besoin accru d’introspection.
Les neurosciences soulignent que notre cerveau réagit très différemment durant cette période : la région corticale, responsable de la réflexion, et celle, plus archaïque, des émotions, ne se développent pas en même temps. Résultat : le cerveau de l’adolescent, encore en construction, tend à privilégier le ressenti par rapport à la réflexion, expliquant en partie pourquoi ces jeunes vivent souvent des hauts et des bas émotionnels difficiles à gérer.
Comprendre cela nous aide à mieux accompagner nos enfants : il ne s’agit pas seulement de leur demander de se calmer ou de faire preuve de patience, mais aussi de leur offrir un espace sécurisé pour exprimer ce qu’ils vivent, tout en guidant leur développement cognitif pour équilibrer émotions et pensées.
Comment gérer la période de la préadolescence ?
Face à cette étape exigeante qu’est la préadolescence, il est naturel de se demander comment réagir et surtout comment accompagner au mieux son enfant dans ces turbulences. Quels conseils peut-on donner aux parents, souvent démunis face à cette tempête émotionnelle ?
Le premier réflexe est d’aborder cette période avec douceur, en s’efforçant d’être à l’écoute et de comprendre la fatigue, le mal-être ou la recherche d’indépendance de son enfant. Il ne s’agit pas de le punir ou de lui faire la morale, mais plutôt d’observer ses comportements avec patience : il ne le fait pas exprès de nous rendre furieux ou de manifester de l’agressivité. Il traverse simplement une étape où il tente de se détacher du cocon familial, de revendiquer sa propre identité. C’est un processus naturel, mais qui demande beaucoup d’attention et de compréhension.
En parallèle, il est utile de rappeler que cette phase correspond aussi à la recherche d’affirmation de soi. Selon Crocetti, auteur du livre Preadolescence. Le garçon tombé des contes, on peut comparer cette étape à une chute des illusions, comme lorsque l’enfant, qui auparavant croyait en toute-puissance magique de ses parents, commence à réaliser qu’il doit se construire lui-même, en sortant de l’univers enchanté pour affronter la réalité. Cette prise de conscience n’est pas toujours douce : elle peut générer frustration ou découragement.
Pour accompagner cette transition, il est important de favoriser l’autonomie, en confiant à l’enfant de petits devoirs ou responsabilités adaptés : gérer son argent de poche, participer à des tâches domestiques, prendre soin de ses affaires ou encore gérer ses horaires et ses responsabilités personnelles. L’idée est d’offrir à l’enfant des espaces d’expérimentation, tout en lui montrant que ses choix ont des conséquences. Cela lui permet d’apprendre à accueillir la frustration, à faire face à ses erreurs sans se sentir abandonné, tout en comprenant que certains repères et limites restent incontournables pour son équilibre.
Il est crucial de poser des règles claires et fermes, mais aussi de laisser une marge d’autonomie. La différence entre « strict » et « permissif » n’est pas toujours simple à trouver. La clé réside dans la cohérence, la transparence et la confiance. En laissant la porte ouverte au dialogue, dans un esprit de curiosité sincère plutôt que de jugement, il devient possible pour l’enfant de se sentir en sécurité pour parler de ses doutes ou de ses difficultés. La curiosité, d’ailleurs, partage la même racine que « prendre soin » : pour accompagner efficacement cette étape, il faut à la fois veiller à leur bien-être, mais aussi explorer leur monde, leur donner envie de s’y engager.
Il est aussi important de comprendre que cette période voit émerger ce qu’on peut appeler la pensée préfrontale, cette dernière étant la dernière zone du cerveau à se développer. Elle regroupe des capacités telles que la pensée abstraite, la planification, le jugement ou la régulation émotionnelle. Notre rôle en tant qu’adultes consiste à soutenir ce développement en proposant des situations qui stimulent la réflexion, en encourageant la responsabilité progressive et en valorisant chaque réussite.
Concrètement, cela signifie encourager l’autonomie en valorisant chaque étape positive, en apprenant à l’enfant à « entrer », « sortir », « s’approcher » ou « s’éloigner » dans la relation, dans le respect de ses besoins. La valorisation des petits succès est souvent plus efficace que les reproches, car elle renforce la confiance en soi et favorise l’équilibre émotionnel.
Gérer aussi la colère ou l’impulsivité devient possible si l’adulte donne un cadre rassurant, en montrant comment canaliser ces émotions et en proposant des stratégies adaptées.
Ce travail demande une grande attention à soi-même, car il faut continuer à se connaître, à comprendre ce qui peut provoquer notre colère ou notre cloisonnement. La patience et l’humilité sont essentielles. La préadolescence est souvent considérée comme une étape difficile, mais elle recèle aussi une formidable richesse : celle d’observer l’éclosion de jeunes passionnés, motivés, en quête d’identité et de lien.
Selon Anton Valigt, il ne faut pas oublier que cette étape transitoire est essentielle : « Personne ne prête attention à cette période intermédiaire où le papillon lutte pour sortir de sa chrysalide. Pourtant, il faut donner plus de valeur aux adolescents, plus de respect, car ce sont eux qui apporteront de la couleur et de la vie dans le ciel de notre avenir. »