Une analyse approfondie de ce que signifie « spectre autistique » : signaux, diagnostics et stratégies de soutien pour une meilleure sensibilisation et inclusion
Qu’est-ce que l’autisme ?
L’autisme, ou plutôt le trouble du spectre autistique, est une condition du développement neurologique qui se manifeste par des modes particuliers de percevoir et de penser, principalement en ce qui concerne les compétences sociales, la communication, les comportements et la sensorialité. Il apparaît dès les premières années de vie, avec des signes qui peuvent inclure des difficultés dans l’interaction sociale, des comportements répétitifs et des centres d’intérêt, parfois très restreints ou absorbants. Ces caractéristiques varient tant en termes d’intensité que de manière de se manifester, et elles peuvent évoluer de façon significative avec l’âge. C’est donc au fil du temps que l’on a élargi la définition pour parler de « spectre autistique », un terme qui reflète cette grande diversité.
Le mot « spectre » met en évidence l’hétérogénéité de ce trouble : tous les individus avec autisme partagent certaines difficultés ou particularités, mais la façon dont cela se manifeste et l’intensité de ces symptômes peuvent différer énormément d’une personne à l’autre. De plus, ces caractéristiques évoluent souvent au cours de la vie, de sorte que ce qui peut sembler un signe d’autisme chez un enfant peut ne pas être apparent chez un adulte, ou peut prendre une autre forme.
Quelles sont les causes ou les facteurs prédisposants de l’autisme ?
Il est essentiel de préciser qu’il n’existe aucun élément ou pratique éducative pouvant provoquer l’autisme. C’est une idée importante à rappeler, notamment parce qu’au cours de l’histoire, certaines hypothèses ont été avancées puis largement discréditées, comme la supposée relation entre vaccination et autisme ou encore entre le trouble et un mode d’éducation distant, peu affectueux ou parentale isolée. Ces théories ont été démenties par des études scientifiques sérieuses.
Par ailleurs, lorsqu’on évoque le spectre autistique, il faut souligner qu’il ne s’agit pas d’une maladie, mais plutôt de traits caractéristiques du fonctionnement d’une personne. Ces traits, tout en étant différents des normes typiques, ne sont pas forcément négatifs ou défectueux. Comme nous le verrons plus en détail, cette condition résulte d’une interaction complexe entre des facteurs génétiques et neurobiologiques, qui concernent la formation, le développement, l’organisation et le fonctionnement du système nerveux central, ainsi que d’éventuels facteurs environnementaux.
Caractéristiques de l’autisme
Les traits principaux de l’autisme touchent trois domaines : la sphère sociales-communicationnelle, le comportement et la sensorialité.
La perception sensorielle, c’est-à-dire la façon dont une personne perçoit son environnement, peut être très différente de celle d’un enfant ayant un développement typique. Par exemple, un enfant autiste peut présenter une hypersensibilité aux sons, aux goûts, aux odeurs ou au toucher. Plus précisément, il peut réagir de manière excessive à :
- des bruits forts ou dans des environnements bruyants;
- certains types d’aliments ou de textures alimentaires;
- des odeurs ou parfums spécifiques (produits de bain, déodorants…);
- certains tissus vestimentaires.
Inversement, il peut rechercher activement certaines sensations ou stimulations sensorielles qu’il trouve agréables, comme par exemple :
- fixer longuement un objet ou le regarder effectuer un mouvement répétitif (comme les roues d’une petite voiture qui tournent);
- sniffer des objets ou des personnes;
- écouter en boucle certains sons;
- se balancer souvent sur lui-même.
De nombreux enfants ou adolescents autistes manifestent des centres d’intérêt voire très inhabituels pour lesquels ils consacrent beaucoup de temps et d’attention.
En outre, il est fréquent de repérer chez les personnes autistes des comportements stéréotypés, c’est-à-dire répétitifs, appelés également « stimming ». Ces derniers représentent une forme d’auto-stimulation sensorielle ou cognitive, qui permet de réduire la tension ou l’ennui, d’accroître la concentration ou de gérer ses émotions. Voici quelques exemples courants de stimming :
- se balancer ou se dandinant;
- marcher en avant et en arrière ou en cercle;
- répéter des sons ou des paroles;
- agit ou batter des mains.
Ces comportements, qu’on retrouve aussi chez tout un chacun dans une certaine mesure, deviennent répétitifs chez les personnes autistes, en particulier dans leur manière de se calmer ou de se stimuler.
Il existe aussi d’autres signaux précoces dans l’enfance, que les parents peuvent repérer dès les premières années de vie :
- des difficultés dans l’interaction sociale, variables selon l’âge et le contexte;
- une réponse incertaine ou faible lorsque leur nom leur est appelé;
- un regard souvent fuyant ou peu porté sur le visage des autres;
- une moindre envie de partager leurs découvertes ou leurs jeux, sauf avec des personnes qui leur sont proches.
Un autre indice pourrait être une moindre capacité à imiter ou à exprimer leurs besoins via des gestes, des expressions faciales ou des mouvements corporels. De plus, un langage qui paraît trop élaboré pour l’âge ou des difficultés à respecter le tour de parole, ainsi qu’une interaction peu active ou une difficulté à se mettre à la place d’une personne « classique » sont aussi des signes à considérer. Alors, comment reconnaître précisément ces signaux ?
On peut dire que toute anomalie dans les compétences sociales ou communicationnelles attendues en fonction de l’âge doit toujours conduire parents et professionnels à envisager une évaluation neuropsychologique. Un spécialiste, en collaboration avec une équipe pluridisciplinaire, pourra analyser ces particularités comportementales, en s’appuyant sur un bilan détaillé réalisé en se référant aux critères diagnostiques des classifications internationales (CIM, DSM). Le diagnostic de l’autisme pourra alors être confirmé, éventuellement appuyé par des tests neuropsychologiques ou des examens complémentaires pour exclure d’autres conditions neurologiques ou psychiatriques.
Comment se fait le diagnostic d’autisme ?
Comment diagnostique-t-on l’autisme ? La démarche repose principalement sur l’observation directe des comportements, aussi bien dans la vie quotidienne qu’en réponse à des stimulations externes. Elle est complétée par les témoignages de proches, qui décrivent les comportements de l’enfant ou de la personne concernée. La synthèse de ces données, recueillies par une équipe expérimentée dans ce domaine, permet d’établir un diagnostic clinique en suivant les critères définis par les systèmes de classification internationale (CIM, DSM). Parfois, des tests neuropsychologiques ou des examens complémentaires seront effectués pour vérifier la présence d’autres troubles du développement ou pour mieux préciser le profil neuropsychologique.
Il est important de souligner qu’à ce jour, il n’existe pas de test génétique ou d’analyse en laboratoire permettant de confirmer ou d’infirmer un diagnostic d’autisme. Toutefois, certains examens peuvent aider à éliminer d’éventuelles pathologies médicales associées.
Une détection précoce est essentielle pour permettre à la famille de mieux comprendre la situation et de s’engager dans un parcours de sensibilisation. Elle offre aussi à l’enfant, à l’adolescent ou à l’adulte une meilleure connaissance de lui-même, de ses forces et de ses modes d’interaction avec le monde. À l’inverse, un diagnostic tardif ou oublié peut entraîner des conséquences négatives, notamment un risque accru de troubles psychiatriques, surtout à l’adolescence. Enfin, établir un profil neuropsychologique précis, c’est-à-dire repérer les points faibles mais aussi les points forts, facilite la mise en place d’interventions ciblées pour accompagner le développement et renforcer les compétences fondamentales.
Autisme : thérapies et stratégies de soutien
Avant de détailler les différentes formes de prise en charge disponibles, il est indispensable de se poser la question suivante : quelles sont précisément les difficultés qui empêchent au moment présent cette personne d’épanouir son potentiel, d’acquérir plus d’autonomie ou de participer à la vie sociale ? En effet, les critères de diagnostic encouragent à examiner chaque situation de façon individualisée, en collaboration avec la famille et l’équipe soignante. Cela permet d’évaluer le niveau de soutien nécessaire : dans quels aspects de la vie quotidienne l’aide ou l’accompagnement s’avèrent-ils indispensables ?
Chaque personne autiste est unique. Bien que partageant certains traits communs, ses besoins diffèrent en fonction de ses caractéristiques innées, de ses compétences acquises, mais aussi de la présence ou de l’absence d’autres troubles du développement. Par exemple, certains développent un vocabulaire étendu ou d’excellentes compétences de lecture, tout en rencontrant des difficultés dans la communication sociale ou dans l’interaction avec leurs pairs. D’autres peuvent avoir une grande habilité manuelle ou artistique, dit « ou encore », mais présenter des difficultés dans la coordination globale ou dans la motricité complexe. Cette diversité doit nous rappeler que l’autisme ne peut pas être réduit à une « étiquette diagnostique », mais doit plutôt être perçu comme une neurodiversité. Il ne s’agit pas de vouloir « normaliser » la personne, mais d’aider à développer des stratégies adaptées pour surmonter les difficultés et valoriser ses points forts.
En définitive, on peut considérer que l’autisme appartient à un ensemble de neurodiversités présentes chez l’humain. L’objectif des interventions n’est pas de faire disparaitre ce profil, mais plutôt d’équiper la personne pour qu’elle puisse gérer ses challenges et s’intégrer au mieux dans son environnement. Il s’agit également de concevoir des espaces, des rythmes, des structures et des services urbains plus accessibles et inclusifs, afin que toutes les personnes, qu’elles soient « typiques » ou en situation de neurodivergence, puissent exprimer pleinement leur potentiel.